Vide depuis le départ de sa dernière occupante, une maison du Sud-Ouest de la France est pleine pourtant d'une foule de personnages disparus. Filmant les meubles, les lumières, exhumant les vieilles lettres, les photos jaunies... la caméra évoque le destin des deux dernières générations qui ont vécu ici et qui sont mes aïeux. Mais la maison parle aussi et me dit crûment ces intimités un peu honteuses qui me viennent d'elle. Et s'il y avait aussi des photos de famille dans nos gènes?
Après avoir consacré un film à mon père dans Fils du siècle, je ressentais la nécessité d'en faire de même avec ma mère ; mais celle-ci n'avait guère envie de se prêter à l'exercice. Comme une métaphore du ventre maternel, j'ai alors filmé sa maison, celle de toute sa famille où elle-même avait grandi et où je suis né aussi. Sur deux saisons, avec mon compère Jean-Paul au cadre, nous avons posé des travellings, éclairé le passé, découvert d'insoupçonnées lucarnes... et le pouvoir de suggestion des images a fait le reste. Un film qui n'a que très peu été diffusé (FR3, un ou deux festivals) mais un de ceux que je considère les plus précieux. Je me souviens avoir éclaté en sanglots le jour où, sortant de l'auditorium et le mixage étant enfin fini, j'avais la sensation palpable que ces gens d'où je viens avaient, par mes images, repris vie.
Vidéo, Couleurs et N et B, 59', 2000
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